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17/01/2008

Petit voyage dans l'âme allemande

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Ce livre est un petit bijou ! Ainsi, d’autres que moi pensent que la langue allemande est un incroyable réceptacle de trésors ?! Cela fait du bien, je me sens moins seule !

 

Voici quelques passages particulièrement savoureux que l’on trouve dans la préface de cet ouvrage :

« C’est incroyable ». Notre ami allemand est stupéfait. « Vraiment, le mot Schadenfreude n’existe pas dans les autres langues ? » Il le demande avec une curiosité sincère, d’un ton qui signifie : « Mais comment vous débrouillez-vous ? » Il a beau être moyennement cultivé, bien parler l’anglais, passablement le français et même l’italien, il ne s’était jamais rendu compte que l’allemand dispose de termes qui n’ont pas d’équivalent dans les autres idiomes. Il imputait cela à ses propres lacunes ».
Le voilà perplexe. « Les Allemands seraient-ils les seuls à se réjouir des malheurs d’autrui ? » Non, le rassurons-nous. Car si nous n’avons pas de mot pour exprimer la « joie qu’on tire des malheurs d’autrui », soit Schadenfreude en allemand, nous connaissons bien le sentiment, à mi-chemin entre l’envie et le rire, que suscitent en nous ces malheurs qui arrivent aux autres. Et quand ils arrivent à des célébrités, l’effet est garanti ».

 

« Quant à nous, qui abordons le monde de l’allemand, nous sommes surpris avant tout par sa précision. Poser un livre debout sur une étagère se dit hinstellen, le poser à plat sur une table : hinlegen. Comment confondre en effet l’acte de mettre un objet à la verticale et celui de le mettre à l’horizontale ? De même, on ne peut « aller » tout simplement quelque part. Trop facile et trop imprécis. Aller comment ? A pied, en voiture, en train, en avion, à cheval ? L’allemand ne tolère pas ce genre de grossièretés. (…) Toute chose a sa place et toute place a sa chose : cette maxime a trouvé sa réalisation dans la langue allemande ».

 

21/12/2007

Maxie Wander

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Je ne sais pas si, comme moi, vous avez des livres qui vous accompagnent dans la vie, comme des bréviaires. De ces livres que l’on trimbale partout avec soi sans avoir besoin de leur véritable présence « physique ». On les a tout simplement en soi et, de temps à autre, on en convoque des passages entiers qui nous ont marqués…
Maxie Wander fait partie de ces auteurs qui ont donné d’autres couleurs à mon quotidien. Et je ne remercierai jamais assez le (presque) hasard qui me conduisit, il y a de cela quatorze ans maintenant (purée, déjà !), à aller vivre à Leipzig, au fin fond de l’Allemagne, de cette Allemagne que précisément on connaissait si peu à l’époque. Quelles images avions-nous de ce pays situé « de l’autre côté » ? Et moi-même, quand je m’engageai à y partir deux années de suite, quelles visions pouvais-je bien avoir en tête, du haut de mes vingt ans qui ignoraient à peu près tout de ce bas monde ?! Je crois que je n’imaginais tout bonnement rien et que c’est à cette absence totale d’imagination que je dois d’avoir écarquillé les yeux sur tout… L’Allemagne de l’Est, à l’époque, enfin ce que l’on appelait l’ex-Allemagne de l’Est et qui ne ressemblait en rien à l’autre, la rutilante que je connaissais, oui, l’Allemagne de l’Est, c’était quelque chose ! Pour obtenir de l’eau chaude dans la salle de bains, je devais descendre à la cave y chercher du charbon ! Ma logeuse s’occupait du reste. Sinon, c’était eau froide au quotidien ! Dans la salle de bains, en tout cas. Et quand ma logeuse m’avait annoncé que vu le cirque que c’était, je ne pourrais prendre mon bain que deux fois par semaine, j’avais légèrement tiqué. Et j’ai souvent pris des douches glacées à cette époque ! Quand j’allais me frotter ensuite au froid du dehors, j’avais même l’impression qu’il faisait presque doux, du coup !

Parallèlement à ce quotidien assez formateur, je suivais des cours à l’université de Leipzig. Là-bas, à l’époque, on enseignait encore une matière formidable qui n’était autre que la « DDR-Literatur », la littérature de RDA. Et c’est ainsi que j’ai découvert une quantité phénoménale d’auteurs venus de l’autre côté… Une littérature pas comme les autres, des bouquins dans lesquels l’essentiel se situait souvent entre les lignes… Parmi tous les auteurs qu’il me fut donné de découvrir (et j’essaierai de les évoquer tous ici), il y eut, entre autres, Maxie Wander. Elle est connue pour avoir surtout recueilli des témoignages de femmes vivant en Allemagne de l’Est. J’en reparlerai bientôt. Elle est également connue pour n’avoir pas eu le temps d’écrire tout ce qui, sans aucun doute, ne demandait qu’à jaillir d’elle… Elle mourut à 44 ans, ce qui ne lui laissa pas l’occasion, je pense, de s’exprimer autant qu’elle aurait pu le faire. Durant la longue et douloureuse période qui a précédé son décès (le cancer l’emporta en 1977), Maxie Wander s’obstina à écrire malgré tout. Essentiellement des lettres et des pages entières dans son journal intime… Mes bréviaires, ce sont ces magnifiques recueils que son époux, Fred Wander, a bien voulu livrer au public… J’en mettrai des passages bientôt sur ce blog.

Ce que j’ai également toujours en tête depuis ma rencontre avec Maxie Wander, ce sont ces mots que son mari (Fred Wander, donc) écrivit pour elle un jour : « Wenn du einem Menschen begegnest, soll er mit einem Lächeln weitergehen, und sein Puls soll um drei Grade stärker schlagen, weil du ihm eine Ahnung von seinen verborgenen Kräften und den in ihm schlummernden Ideen verschafft hast ». Ce qui veut dire : « Lorsque tu rencontres quelqu’un, il doit repartir avec le sourire, et son pouls doit battre trois fois plus fort, parce que tu lui auras donné à pressentir ses forces cachées et les idées qui sommeillent en lui ». Combien de rencontres de ce genre faisons-nous en une vie ? Très peu, finalement… Et nous, de notre côté, savons-nous rendre les autres attentifs à ce qui sommeille en eux ? Difficile exercice, n’est-ce pas ?! Pour ma part, c’est essentiellement grâce à certains livres et à certaines œuvres d’art que j’ai entendu soudain une petite voix en moi, senti des forces cachées, des idées en suspens qui ne demandaient qu’à jaillir… Merci à Maxie Wander, qui fut, entre autres, une «déclencheuse » d’idées chez moi ! Elle m’a appris à essayer d’enlacer la vie à chaque seconde. Et quand je me laisse bouffer bêtement par mes colères quotidiennes, dues à des broutilles finalement, je devrais me replonger systématiquement dans les écrits de cette grande dame… Faire silence et me remémorer tous ces passages qui me font à chaque fois battre le pouls trois fois plus vite et que je vous mettrai ici très, très bientôt !

07/12/2007

Göttingen encore (pour la petite histoire...)

Cela faisait longtemps que je voulais de nouveau me renseigner sur ce qui a conduit Barbara à écrire « Göttingen ». Je me souviens qu’elle en parlait dans ses mémoires inachevés, mais je ne savais plus où se trouvait le passage. En lisant Barbara, portrait en clair-obscur, de Valérie LEHOUX, j’ai pu retrouver les événements qui ont poussé Barbara à écrire cette belle chanson de paix…

« Nous sommes en 1964. Barbara chante à L’Ecluse. Elle en est la vedette. Elle se produit en fin de soirée, aux alentours de vingt-trois heures, après les chansonniers, les humoristes, les débutants. (…)

A L’Ecluse, une jeune femme vient souvent l’écouter. Elle s’appelle Sibylle Penkert, elle est allemande, elle adore la chanson. Sibylle le dit, elle l’écrit, le répète autour d’elle : cette Barbara qu’elle entend à L’Ecluse est une artiste hors du commun ! Et maintenant, elle ne rêve que d’une chose : la faire venir chez elle, en Allemagne, à Göttingen ».
Le 3 avril 1964, la jeune Allemande rédige une lettre qu’elle adresse à Barbara. Premier réflexe de l’artiste : refuser.

Je cite à nouveau Valérie Lehoux : « La guerre a laissé des traces profondes, à vif. Les plaies ne se sont pas fermés, les esprits pas apaisés. ‘L’Allemagne était comme une griffe’, confie-t-elle. Göttingen ? Non, vraiment, impossible d’aller chanter là-bas ! »

(…) Puis, Barbara réfléchit sérieusement à cette invitation. « Elle se dit que, finalement, elle devrait accepter la proposition de Sibylle. Quand se décide-t-elle ? Pourquoi se décide-t-elle ? Le sait-elle elle-même ?

Mauvaise humeur. ‘Je pars donc pour Göttingen en ce mois de juillet 1964. Seule et déjà en colère d’avoir accepté d’aller chanter en Allemagne ‘. Sur le quai, à l’arrivée, un jeune homme l’attend : c’est Gunther Klein, le directeur artistique du « Junges Theater », où Barbara doit se produire. Et lui est de très bonne humeur, tout au bonheur d’accueillir Barbara ! (…)

Barbara a le visage fermé. ‘Il insiste pour me faire visiter la ville, si belle en cette saison’. Pas question. Elle ne veut rien voir, rien d’autre que le théâtre. Ainsi soit-il : Gunther, toujours de bonne humeur, la conduit jusqu’au lieu du concert, une jolie petite salle d’une centaine de places dirigée depuis peu par une équipe dynamique, et surtout fréquentée par les étudiants de Göttingen. Ici ils ne manquent pas : ils sont ptrès de dix mille ! Voilà qui devrait l’adoucir : la jeunesse, la musique et la curiosité… Mais rien n’y fait : à peine Barbara a-t-elle pénétré dans la salle que son visage se fige un peu plus. En lieu et place du demi-queue noir qu’elle a exigé se trouve un énorme instrument surgi d’un autre temps. D’un cauchemar !

(…) C’est alors que Gunther lui explique qu’il y a à Göttingen, en ce moment même, une grève des déménageurs de piano. Réaction de Barbara : «Voilà qui change tout. Je passe de la colère à la tristesse ».

Gunther a une idée : de jeunes étudiants de sa connaissance pourraient peut-être aller emprunter un piano noir, à queue, à une vieille dame qu’ils connaissent.

Vers 22 heures, miracle : le piano tant attendu arrive ! Tout rentre dans l’ordre. Gunther propose même à Barbara de prolonger son contrat d’une semaine. Elle accepte ! Les jours suivants, elle découvre la ville, accompagnée de ses déménageurs de fortune. La veille de son départ, elle écrit  un petit texte qu’elle lira sur scène avant de partir :

« Bien sûr, ce n’est pas la Seine,

Et c’est loin du pont de Suresnes,

Mais c’est bien joli tout de même

A Göttingen, à Göttingen »…

De retour à Paris, elle peaufinera la chanson et l’enregistrera. Sur scène, elle la chantera partout, jusqu’à l’ultime concert de 1994. Et la chanson lui survivra. En janvier 2003, lors des festivités marquant le quarantième anniversaire du traité d’amitié franco-allemand, le chancelier Gerhard Schröder en lira un extrait. Geste peu commun dans les cénacles diplomatiques.

 « Oh, faites que jamais ne revienne

Le temps du sans et de la haine

Car il y a des gens que j’aime

A Göttingen, à Göttingen »…

Et je crois que c’est en novembre 2001 que fut inaugurée, à Göttingen, une rue Barbara (Barbarastraße). La boucle est bouclée…

Je n’ai pas vu cette rue quand je suis allée à Göttingen, j’ignorais tout simplement son existence. En revanche, l’an dernier, après être allée voir Thiéfaine sur une scène parisienne, j’ai demandé à Sam de faire un crochet par Précy-sur-Marne, où la chanteuse Barbara vécut de 1973 à son dernier jour. Ce fut très émouvant de pouvoir discuter avec un monsieur qui avait connu Barbara… Le petit village de Précy est magique. On y trouve partout des indices rappelant que l’âme de la longue dame brune y danse encore. Ainsi ce nom de rue :

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