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10/03/2018

Sarrebruck (Saarbrücken), une ville à découvrir !

La ville de Sarrebruck gagne à être connue. Là, plus qu'ailleurs et surtout bien plus que dans les discours parfois tristement creux de nos hommes politiques, bat le cœur de l'amitié franco-allemande. En flânant dans les rues ou les magasins, on entend parler les deux langues, et c'est un doux mariage sans préjugés. Chaque année, la plupart du temps à cheval sur mai et juin, la ville organise le festival franco-allemand Perspectives. De quoi régaler tous ceux pour qui une certaine vision de l'amitié franco-allemande n'est pas qu'une sinistre lettre morte enfermée à double tour dans le tiroir d'un bureau poussiéreux !

Une escapade à Sarrebruck peut offrir une foule de petites joies : la vieille ville ne manque pas de charme, loin de là. Les abords du château offrent une belle vue sur la partie moderne de la ville, de l'autre côté de la Sarre. Toujours près du château, on découvrira avec émotion une place au nom étrange : Platz des unsichtbaren Mahnmals. En français la place du mémorial invisible. Sur une idée de Jochen Gerz, les pavés que l'on foule lorsque l'on se rend au château sont marqués d'une inscription, celle du nom d'un cimetière juif. Mais on ne voit pas tous ces noms, ils ont été gravés sur les faces tournées vers le sol. Si bien que ce qui apparaît pour le visiteur, ce sont des pavés qui semblent tout à fait communs. Ils sont loin de l'être et rappellent, d'une manière pour ainsi dire fantomatique, qu'à cet endroit, au temps du national-socialisme, se trouvait le QG de la Gestapo.

On ne manquera pas d'aller voir, de l'autre côté de la Sarre, l'Hôtel de ville, qui abrite l'office du tourisme et dont la façade est ornée de différents personnages représentant de vieux métiers artisanaux. Il y a là, entre autres, un mineur, un commerçant, un tanneur, un brasseur. La Ludwigskirche, que l'on doit à l'architecte Johann Friedrich Stengel, est à voir absolument elle aussi. Elle fut entièrement détruite durant la Seconde Guerre mondiale, et reconstruite ensuite à l'identique. L'intérieur est d'une blancheur époustouflante. D'une sobriété à couper le souffle.

Une petite flânerie au bord de la Sarre peut être bien agréable par beau temps. Bref, il y a de quoi faire. La grande artère commerçante de Sarrebruck, la Bahnhofstraße, peut largement contenter tout le monde, petits et grands, fortunés et bourses plus modestes. Ici fleurissent en effet des magasins bon marché, comme Allerlei qui offre un joyeux bric-à-brac !

Surtout, il ne faudrait pas manquer la Galerie d'art moderne. Elle a été fermée pendant un an et demi pour des travaux d'extension, et la voilà de nouveau ouverte depuis quelques mois. À l'intérieur, on va de surprise en émerveillement et d'éblouissement en ébahissement. Le musée renferme une impressionnante collection de tableaux appartenant au courant artistique Der Blaue Reiter. Gabriele Münter côtoie comme il se doit Franz Marc et August Macke.

L'une des salles abrite un tableau très touchant de Paula Modersohn-Becker, Dreebeen mit Ziege und Hühnern : il représente une paysanne entourée de plusieurs poules et d'une chèvre. Toute la physionomie de cette femme âgée semble mangée par la lassitude. Épaules lourdes et paraissant indiquer un effondrement imminent. Un visage fatigué, des yeux qui s'effacent. Et pourtant, quelle présence ! La main gauche, rondelette et ferme, tient une canne et montre comme une détermination farouche : c'est qu'on n'a jamais faibli devant le labeur à accomplir !

Une autre œuvre me touche beaucoup : Judenfriedhof in Randegg, d'Otto Dix. Peint en 1935, ce tableau représente un cimetière juif dans un paysage hivernal. Émergeant de la neige, les tombes, de guingois, ont à la fois quelque chose de fragile et d'obstiné. Le ciel, menaçant, héberge bien des tempêtes à venir. Les arbres noirs et nus forment un contraste assez terrifiant avec la blancheur quasi immaculée qui recouvre le sol. Une œuvre de résistance et de courage en pleine tourmente nationale-socialiste, alors même qu'Otto Dix était persécuté par les nazis. D'ailleurs, une des salles du musée, nommée Provenienzforschung (recherche de provenance), montre que l'Allemagne poursuit son devoir de mémoire. Durant ce qui fut la plus sombre page de l'histoire allemande, des œuvres d'art appartenant à des familles juives leur furent confisquées : il s'agit désormais de retrouver les descendants des propriétaires et d'envisager une solution à l'amiable quant à l'avenir des œuvres en question.

La Galerie d'art moderne de Sarrebruck abrite également un certain nombre d'œuvres françaises : des sculptures de Rodin, une autre de Gauguin, des tableaux de Renoir, Courbet, Boudin, Pissarro, Signac, Derain, et j'en oublie.

Lors de ma dernière visite de ce musée (hier !), j'ai apprécié aussi les installations merveilleusement colorées de Pae White, les tableaux d'Alexej von Jawlensky (en particulier Heilandsgesicht), ceux d'Otto Müller, d'Oskar Schlemmer, de Max Slevogt, Max Liebermann, Lovis Corinth, Max Pechstein. Et bien d'autres richesses encore ! Le musée accueille tant de joyaux qu'il est difficile d'en dresser une liste exhaustive. Un seul conseil : on monte dans sa voiture ou dans le premier train, et l'on se rend soi-même sur place pour constater de visu et, surtout, se laisser submerger par mille émotions !

 

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