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28/01/2017

Weit über das Land, le dernier roman de Peter Stamm

De la plume de Peter Stamm sortent des univers et des ambiances. Longtemps après la lecture de tel ou tel de ses livres, on se souvient d'une atmosphère particulière qui imprégnait un décor entier. Le dernier roman de l'auteur suisse n'échappe pas à la règle. Dès les premières lignes, on sent qu'un monde va nous prendre dans ses griffes pour ne nous lâcher que 223 pages plus loin, haletant et légèrement groggy. Et encore : pas sûr que l'on puisse se dire tiré d'affaire une fois la lecture achevée. L'incipit évoque une maison encerclée de buissons. Tout autour, une surface gazonnée qui s'apparente, une fois que l'ombre gagne, à un cachot duquel il est impossible de sortir. Une sensation d'étouffement naît chez le lecteur. Sans doute est-ce la même qui pousse Thomas, qui vit en ces lieux, à partir un jour sans raison apparente. Il vient de passer un séjour agréable en Espagne avec sa femme et leurs deux enfants. Tout semble lui réussir, et pourtant... Et pourtant, rien ne le retient plus dans cette vie réglée comme du papier à musique. Il quitte la table où il discutait tranquillement avec Astrid, son épouse, et s'en va. Sans autre forme de procès. Le voilà lancé dans une existence vagabonde. On l'accompagne dans ses pérégrinations et ses luttes (notamment contre le froid et la faim). On suit également Astrid. Au fil du récit, on la sent vaciller par moments, puis se ressaisir toujours, animée d'un espoir tenace qui m'a, allez savoir pourquoi, fait penser aux mots de Péguy : « Ce qui m'étonne, dit Dieu, c'est l'espérance.
Et je n'en reviens pas.
Cette petite espérance qui n'a l'air de rien du tout.
Cette petite fille espérance.
Immortelle. »

Astrid s'accroche à son espérance comme un naufragé enlacerait solidement une planche vermoulue, parce qu'on ne sait jamais, n'est-ce pas, le salut pourrait venir de ce trois fois rien additionné à la ténacité. Il y a là, me semble-t-il, une allégorie de notre condition humaine. Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir, dit la sagesse populaire, et si la réciproque était vraie ? C'est en tout cas ce que nous enseigne l'attitude d'Astrid. Pareille au roseau qui plie mais ne rompt pas, elle semble vouloir nous dire que les événements ne sont que ce que la volonté en fait.

Le roman soulève bien d'autres questions : comment rester maître de son destin ? Qu'est-ce que la liberté ? Comment ne pas la perdre dans une existence commandée par toutes sortes de métronomes dont le balancement nous enjoint sans cesse d'obéir ? Comment se dérober à l'absurdité d'une telle monotonie et pourquoi s'y dérober ? L'amour peut-il faire sempiternellement contre mauvaise fortune bon cœur ?

Une fois de plus, Peter Stamm désarçonne, met mal à l'aise, pose des questions dont les réponses peuvent déranger. Mais qu'il est bon d'être secoué par un livre !

 

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