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30/05/2009

L'ardoise

 

Je ne comprends pas... Elle ne faisait jamais faux bond à personne. Côté politesse, elle était championne. Jamais en retard à aucun rendez-vous. Toujours là, fidèle... Plutôt même en avance d'ailleurs. Elle ne laissait jamais rien en plan, ce n'était pas son genre de commencer quelque chose et de ne pas l'achever. Et je crois qu'à la regarder agir ainsi, j'en ai pris de la graine. Je l'espère, en tout cas. La seule chose que je puisse faire encore pour la maintenir un peu en vie, c'est de cultiver ce qu'elle m'a enseigné. C'est d'essayer de le transmettre à mon tour, même si je suis sans doute moins habile qu'elle...

Elle est donc partie comme ça, sur la pointe des pieds. La reine de la discrétion, ma mère. Jusqu'en sa sortie de scène... Elle qui n'aurait jamais posé un lapin à qui que ce soit, elle nous a tous plantés là. De même, elle a fait faux bond au printemps qu'elle aimait tant pourtant. La brutalité de cette mort m'obsède à présent. Je me dis que moi aussi, d'ailleurs, j'ai intérêt à me presser un peu et qu'il ne me reste finalement pas tant que ça de temps.

Jean-Claude Pirotte écrit dans La légende des petits matins : « Nous laisserons tous une ardoise, ô Patrick, Breton sourcilleux. Tous à l'heure dite, car il est écrit dans les astres et dans nos paumes ravinées que nous mourrons avant de nous être acquittés de l'essentiel. Nous aurons bu sans la payer la dernière gorgée d'amertume ». Voilà. On part comme ça, en laissant quelque part, dans un coin de bistrot, une ardoise que nul ne viendra régler, personne n'ayant l'indécence de réclamer la somme due. En laissant aussi, dans un coeur ou l'autre, plus qu'une ardoise : une enclume... Un poids qui toujours s'ingéniera à venir ternir le plus beau, le plus pur, le plus grand des bonheurs...

28/04/2009

"Melancholische Abschiedsstimmung"...

 

Quand j'aime un livre, je déteste le refermer définitivement. Et c'est comme si j'en sirotais les dernières pages encore plus que les autres. Comme si je prenais mon temps, tout à coup, afin de prolonger l'instant magique. Celui de la lecture. La lecture qui n'est rien d'autre qu'une rencontre. Ou plutôt de multiples rencontres. Avec un autre être, avec d'autres façons de penser, avec d'autres mondes. Le virus de la lecture m'est venu très tôt. Dès que j'ai su lire, je crois, je me suis nourrie de mots ! Et, depuis l'âge de huit ans, j'ai précieusement gardé Les Contes bleus du chat perché, de Marcel Aymé, livre à la fin duquel j'avais écrit d'une main maladroite : « Ce livre était beau merci maman et Marcel Aymé » (sans virgule, sans point !!). Je crois que ces mots résument finalement bien les choses : à la fin d'une belle lecture, on peut remercier l'auteur du livre et également celui ou celle qui nous l'a fait découvrir. Cela peut être soi-même aussi !

Aujourd'hui, très solennellement, je remercie Hape Kerkeling ! Son livre retraçant toutes les aventures et mésaventures qu'il a vécues lorsqu'il s'est rendu à Saint Jacques de Compostelle est une pure merveille. Que l'on croie ou non en Dieu, on referme le livre avec un petit éblouissement dans les yeux, une étincelle dans le coeur. L'envie d'y croire, un peu comme Jacques Brel qui, dans son « Dites, si c'était vrai », semblait implorer Dieu d'exister !

Magnifique livre, donc, que ce témoignage de Hape Kerkeling. Etrangement, en l'ouvrant, je me posais quelques questions. Etrangement, en le lisant, je me suis rendu compte que souvent Hape Kerkeling me livrait à sa façon des réponses à ces mêmes questions. Drôle de truc, vraiment. Mais je n'invente pas.

Chaque livre que l'on ferme est à mes yeux une préfiguration de la mort. C'est un véritable déchirement, un glas qui sonne. Bien sûr, on peut toujours se dire qu'on a le droit de relire le livre en question, mais si la vie ne nous en laissait plus le temps et le loisir ? En refermant un livre, on ressent en soi et tout autour de soi ce que Hape Kerkeling, devant quitter ses deux compagnes de pèlerinage, nomme une « melancholische Abschiedsstimmung »... Et aussi une immense joie, celle de se dire que désormais, on a un livre de plus ancré dans le coeur... Ben oui, je tombe dans la guimauve, mais pour moi la lecture n'est rien d'autre qu'un immense acte d'amour !

19/04/2009

Ich bin dann mal weg (un livre de Hape Kerkeling)

Ich bin dann mal weg 

Un peu d'optimisme, pour changer. Et retour au but premier de ce blog, à savoir parler de l'Allemagne et de ce qui s'y rattache.

Il y a quelques années, un certain Hape Kerkeling, personnalité de la télévision allemande, faisait un tabac avec un livre racontant son voyage sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle. Ce livre m'a toujours intriguée. Dernièrement, je l'ai acheté à Sarrebruck, la ville bien sympa dans laquelle je fais très souvent mes emplettes littéraires. Et c'est un vrai bonheur que cette lecture ! On a l'impression de vivre les pérégrinations de l'auteur. On vit au rythme de ses doutes, de ses enthousiasmes, de ses coups de fatigue aussi. Il lui arrive toutes sortes d'aventures sur ce long chemin. Il rencontre également toutes sortes de gens. Des farfelus, des pénibles, des sympas. Et chacun, à sa façon, lui apporte quelque chose. Hape Kerkeling sait tirer profit de chaque expérience. Mieux : il l'accueille en la bénissant, en s'y plongeant corps et âme.

En ouvrant ce livre, je crois que j'étais avide de consolation en ces temps difficiles. Et de spiritualité aussi. Les événements des mois passés m'ayant laminée, j'ai du mal à trouver encore un sens à nos tribulations en ce bas monde. Le livre de Hape Kerkeling m'est donc tombé à point nommé entre les mains. En voici deux passages que je trouve particulièrement savoureux :

 

« Wer erleuchtet werden will, muss wahrscheinlich erst mal das totale Gegenteil erleben : die Verfinsterung ».

 

« Während meines Weges hab ich mich immer wieder gefragt, was eigentlich Leiden ist. Am Ende ist Leiden doch ein 'Nicht-Verstehen'. Und wenn man etwas nicht versteht, muss man Vertrauen haben ».

 

Ces mots ont une résonance particulière en moi. Hape Kerkeling se demande en chemin ce qu'est réellement la souffrance. Réponse : la souffrance, c'est une « non-compréhension » (cela ne rend vraiment pas en français !!). Et quand on ne comprend pas quelque chose, il faut avoir confiance. C'est bête, mais ces quelques phrases m'ont presque réconciliée avec la souffrance accumulée ces derniers temps. Souffrance que je n'ai pas comprise. Mais il paraît qu'il faut avoir confiance... Merci, monsieur Kerkeling ! En tout cas, moi qui me disais vaguement qu'un jour je ferais le « Jakobsweg », j'ai compris aussi, en lisant ce livre, que cette expérience n'était pas pour moi !!