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30/05/2009

L'ardoise

 

Je ne comprends pas... Elle ne faisait jamais faux bond à personne. Côté politesse, elle était championne. Jamais en retard à aucun rendez-vous. Toujours là, fidèle... Plutôt même en avance d'ailleurs. Elle ne laissait jamais rien en plan, ce n'était pas son genre de commencer quelque chose et de ne pas l'achever. Et je crois qu'à la regarder agir ainsi, j'en ai pris de la graine. Je l'espère, en tout cas. La seule chose que je puisse faire encore pour la maintenir un peu en vie, c'est de cultiver ce qu'elle m'a enseigné. C'est d'essayer de le transmettre à mon tour, même si je suis sans doute moins habile qu'elle...

Elle est donc partie comme ça, sur la pointe des pieds. La reine de la discrétion, ma mère. Jusqu'en sa sortie de scène... Elle qui n'aurait jamais posé un lapin à qui que ce soit, elle nous a tous plantés là. De même, elle a fait faux bond au printemps qu'elle aimait tant pourtant. La brutalité de cette mort m'obsède à présent. Je me dis que moi aussi, d'ailleurs, j'ai intérêt à me presser un peu et qu'il ne me reste finalement pas tant que ça de temps.

Jean-Claude Pirotte écrit dans La légende des petits matins : « Nous laisserons tous une ardoise, ô Patrick, Breton sourcilleux. Tous à l'heure dite, car il est écrit dans les astres et dans nos paumes ravinées que nous mourrons avant de nous être acquittés de l'essentiel. Nous aurons bu sans la payer la dernière gorgée d'amertume ». Voilà. On part comme ça, en laissant quelque part, dans un coin de bistrot, une ardoise que nul ne viendra régler, personne n'ayant l'indécence de réclamer la somme due. En laissant aussi, dans un coeur ou l'autre, plus qu'une ardoise : une enclume... Un poids qui toujours s'ingéniera à venir ternir le plus beau, le plus pur, le plus grand des bonheurs...

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