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13/08/2009

Lectures d'été...

 

Durant mon court séjour en Bretagne, j'ai eu le temps de lire un peu. Chaque soir, une fois que les filles étaient couchées !! J'ai terminé le livre Soie d'Alessandro Baricco. Un livre d'une grande force poétique. La fin est totalement inattendue. En tout cas, moi, je ne m'attendais pas à ce dénouement-là. Et j'ai hâte de voir ce que va donner l'adaptation cinématographique de ce beau roman.

Ensuite, je me suis plongée dans Ich nicht, de Joachim Fest. Joachim Fest était un historien et journaliste allemand, né en 1926 et mort en 2006. Sa famille a résisté aux nazis et c'est cette résistance-là dont il est question dans Ich nicht. Le titre signifie « pas moi ». Alors que tant d'autres vont pactiser sans vergogne avec le diabolique, Joachim Fest et sa famille disent tous en choeur : « Ich nicht ». Pas moi ! Le titre est inspiré d'une sentence latine chère au père de Joachim Fest : « Etiam si omnes – ego non! ». En allemand, cela donne : « Auch wenn alle mitmachen – ich nicht ! ». En français : « Même si tous en sont, pas moi ! ». Belle devise, n'est-ce pas ? Joachim Fest évoque son enfance sous le Troisième Reich, le désespoir de son père face à l'aveuglement du peuple allemand, mais aussi de menus détails qui font la vie d'un enfant. Il livre également de très fines analyses psychologiques. Il ouvre les yeux et voit qu'autour de lui tout a changé. Tout et tous, ou presque. Ainsi cette voisine qui traite Joachim de petit délinquant pour trois pommes volées. Et d'ajouter que le parti a tout de suite bien compris à qui il avait affaire et a eu raison de démettre le père de Joachim de ses fonctions. Ceci me semble particulièrement intéressant : ces tempéraments qui, sous l'effet du fanatisme, se révèlent, s'exacerbent.

Et puis il y a tous ces autres qui, sans aucune conviction, s'acoquinent avec le nazisme pour avoir la paix. C'est d'ailleurs une suggestion que madame Fest fait un jour à son époux. Elle se dit que s'il acceptait de faire quelques compromis, il pourrait retrouver un travail et mener une vie paisible. Mais monsieur Fest n'est pas de ceux qui abandonnent aussi facilement. Et il poursuit la lutte. Envers et contre tous. Une forte leçon de courage. Je vais m'y replonger tout de suite. J'en reparlerai sans doute ici.

25/06/2009

Ruhm

  Ruhm: Ein Roman in neun Geschichten

J'aime bien ce livre. L'auteur a lui-même précisé, en-dessous du titre : « Ein Roman in neun Geschichten ». C'est-à-dire un roman en neuf histoires. Des histoires d'une vingtaine de pages chacune. La première m'a beaucoup plu : un homme, jusque là totalement réfractaire à l'utilisation du portable, se décide à s'en acheter un. Or, il se voit attribuer le numéro d'un autre homme, un certain Ralf. Qui, lui, est très demandé. Au départ, Ebling, celui qui a récupéré ce numéro, tient à préciser aux gens qui l'appellent qu'ils font erreur. Puis, il commence à se prendre au jeu. Et à se faire passer pour ce Ralf qui a une vie sentimentale hautement palpitante. Ebling donne rendez-vous à une dame, puis ne se rend pas au rendez-vous, évidemment. Etc. Le jeu en question l'émoustille tellement qu'il en retrouve du désir pour son épouse ! Jusqu'au jour où, curieusement, plus d'appels pour Ralf. Le portable devient quasi muet. Et Ebling prend soudain la mesure du vide de son existence... Il a suffi d'un tout petit rien pour qu'il voie dans quel néant patauge son quotidien... Ebling garde cependant tout le temps son téléphone à portée de main, des fois que... Et son collègue bien intentionné de lui faire remarquer : « Mais qui pourrait donc t'appeler ? ». J'aime bien cette histoire et l'idée que parfois, un infime détail vient tout faire vaciller, rompant l'équilibre que l'on croyait acquis et qui n'était en fait qu'un semblant d'équilibre...

Puis, il y a cette histoire d'une femme médecin sans frontières qui s'amourache d'un écrivain pétri d'angoisses diverses et variées. Enorme décalage entre cet homme qui contemple pas mal son nombril et cette femme qui a plutôt tendance à mettre sa vie au service de celle des autres... En voilà deux qui sont bien barrés, encore !

Ensuite, c'est l'histoire de Rosalie. Elle se sait condamnée à plus ou moins longue échéance par un cancer qui lui ronge le pancréas. Elle décide d'avoir recours à un organisme suisse qui l'aidera à abréger ses souffrances. Sauf que Rosalie n'est pas une femme comme les autres : c'est un personnage de roman. Et l'on assiste à de « vraies » querelles entre Rosalie et l'écrivain qui lui a donné la vie ! Elle le supplie de changer son destin. Il peut encore tout effacer. La rajeunir, même ! Cèdera-t-il ? C'est ce que vous apprendrez si vous lisez Ruhm, de Daniel Kehlmann ! Pour l'instant, j'en suis là. Et je vais me dépêcher de publier cette note pour aller lire sans plus tarder la quatrième histoire, intitulée « Der Ausweg » !

23/06/2009

Anna

 

P1010493 [640x480] [50%].JPGQuand j'étais enfant, je passais toutes mes vacances en Bretagne. Eté : Bretagne. Toussaint : Bretagne. Février : Bretagne encore ! Pâques : Bretagne toujours ! Mon Breton de père avait décrété que nous n'irions jamais ailleurs, question de principe ! Surtout, il avait suivi ma mère en Lorraine et y passait les trois quarts de son temps. Alors, dès qu'il était en congé, direction les Côtes d'Armor, que j'ai même connues sous l'appellation « Côtes du Nord » ! Nous allions toujours au même endroit, dans un village paumé du 22... Où les gens avaient des voitures invraisemblables, qu'on ne voyait plus que dans le 22, justement ! Un village où l'alcool faisait des ravages dans la population. Où la plupart des gens s'exprimait dans une langue que ma mère, mon frère et moi ne comprenions pas. Mais que mon père maîtrisait très bien, lui ! Quand il se mettait en colère, il ne connaissait que le breton, par exemple !

Un bled paumé où nous nous éclations quand même à fond. Un endroit qui nous réservait toujours des surprises. Parfois, c'était Byzance : tous mes cousins y passaient leurs vacances en même temps que nous. Parfois aussi, il y avait de nouveaux visages. Souvent des gamins d'autres régions de France qui venaient passer leurs vacances chez leurs grands-parents. Et c'est ainsi que j'ai beaucoup joué avec les petits-enfants d'une certaine Marguerite et ceux aussi d'une certaine Lucie. Pour ajouter au charme de l'endroit, il y avait la mer à 30 kilomètres, alors qu'aurait pu demander le peuple ?!

Puis, la crise de l'adolescence aidant, je n'ai plus tellement voulu suivre mes parents. A partir de 17 ans, je ne suis plus allée en Bretagne. Pendant les vacances, je restais en Lorraine avec ma grand-mère maternelle, mes parents se rendaient seuls au bout du monde !

Puis, un jour, la nostalgie. L'envie folle de revoir ce lieu insolite ! C'était en 1994, si mes souvenirs sont bons. En me voyant arriver, Lucie s'était écriée : « C'est pas vrai, c'est toi, c'est bien toi ? » Il y avait belle lurette que ses petits-enfants ne venaient plus passer leurs vacances en Bretagne... Pauvre Lucie, qui avait perdu un fils et ne s'en était jamais remise. Pauvre Lucie, qui me disait parfois (je cite tellement c'est amusant et pur) : « Comment je fais, moi, avec mon mari qui est sourd à la maison ? » !!!! Pauvre Lucie, morte il y a quelques années déjà. Sa fille avait pris soin de me prévenir, me disant que toujours Lucie avait parlé de moi, et qu'elle était fière de moi. Et moi donc, qu'est-ce que j'étais fière d'elle ! Fière d'être son amie !

Et puis, il y avait Anna. Elle, je n'ai jamais joué avec ses petits-enfants. Mais je la connaissais bien. Elle s'était mariée avec un Parisien (d'ailleurs, on l'appelait « le Parisien » !!), mais restait attachée à son village d'origine. Pendant longtemps, ils ont tous deux fait la navette entre Paris et la Bretagne. Jusqu'au jour où leurs forces sont allées s'amenuisant et où ils ont décidé de poser définitivement les valises dans les Côtes d'Armor. Anna et son mari, Yves, je les ai toujours considérés comme les philosophes des lieux ! A partir de 1994, je suis retournée très régulièrement à Lohuec (le nom est lâché !) et je ne manquais jamais de leur faire une petite visite. Anna me parlait de ma grand-mère paternelle, dont elle avait été la grande amie. Et cela tombait bien car moi, cette grand-mère, je ne l'ai jamais connue. Pour des raisons assez sombres. Elle est morte quand j'avais une douzaine d'années, mais nous avons toujours eu interdiction de l'évoquer. Mon père ne le souhaitait pas, pour des raisons qui lui étaient propres et que nul ne peut juger... Bref... Anna. Une force de la nature. Qui m'a toujours adorée plus que de raison. Et que j'adore aussi, à un point qu'elle ne peut même pas imaginer ! Quand j'arrive chez elle, ce sont toujours les effusions. Et quand je repars en Lorraine, je lui rends une traditionnelle visite d'au revoir, en espérant que ce ne sera pas un adieu. Car Anna a 93 ans, quand même ! Et nous nous quittons des larmes plein les yeux, et Anna me dit : « Tu ne reviens pas assez souvent ici ». Anna à qui j'ai téléphoné, en larmes, en février, pour lui annoncer la mort de ma mère. Anna qui pleurait presque avec moi, je l'ai senti à sa voix. Anna qui m'a dit : « Mais viens donc faire un tour en Bretagne dès que tu peux, cela te fera le plus grand bien ». Anna qui m'a dit aussi : « Ne sombre pas, tu es maman toi aussi, bats-toi ».

Alors, ma chère Anna, ma philosophe, cet été, tu vois, je vais être raisonnable et suivre ton conseil : je viendrai à Lohuec. Début août. Tiens bon, je t'en supplie. Jusque là et plus encore...