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05/05/2010

Elke Heidenreich, "Die schönsten Jahre"

 

En ce moment, je suis à fond dans Elke Heidenreich et Miossec (j'ai d'ailleurs décidé d'ouvrir un blog consacré à ce dernier, une folie de plus ! Deux blogs, c'était déjà pas mal, mais là je vais exploser les compteurs, je suis cinglée !!). Quand on aime écrire, on ne compte pas le nombre d'endroits où on laisse sa griffe !!!

Elke Heidenreich, c'est une personnalité bien connue en Allemagne. La dame s'occupe pas mal de littérature, elle a animé pendant plusieurs années une émission littéraire sur une chaîne allemande. Elle entretient avec les livres le rapport que j'ai moi aussi à ces précieux objets-là. Un rapport d'amour ! Elke Heidenreich a travaillé pendant longtemps comme chroniqueuse pour la revue allemande Brigitte. Ses chroniques commençaient toutes par « Also ». Pour notre plus grand bonheur, elles ont été rassemblées dans plusieurs volumes et on peut s'en délecter à loisir. En tout cas, c'est ce que je fais, moi. Also, ce sont des tranches de vie. Des trucs qui vous arrivent... On croit que ça n'arrive qu'à soi et puis, grâce à Elke Heidenreich, on s'aperçoit que ça arrive aux autres aussi ... à Elke Heidenreich, en tout cas (la référence n'est pas moindre et même flatteuse !)

Elke Heidenreich a également signé quelques livres, dont un recueil de nouvelles que je viens de commencer : Der Welt den Rücken, ce qui signifie « le dos tourné au monde ». Ces mots sont empruntés à Romain Gary (ce qui n'est évidemment pas pour me déplaire !!). La citation exacte (en allemand, en tout cas), la voici : « ...weil das Glück eines Paares stets der Welt den Rücken kehrt » (à savoir : « parce que le bonheur d'un couple tourne constamment le dos au monde »). Le recueil s'ouvre sur une nouvelle intitulée « Die schönsten Jahre ». Nina, la narratrice, entretient des relations compliquées avec les hommes de sa vie (elle a été mariée durant de longues années, elle a deux fils et, maintenant qu'elle est divorcée, vit des histoires d'amour qui se fracassent toutes dans le décor). Elle a des relations compliquées avec sa mère aussi. Sa mère qui n'a jamais su la complimenter, jamais su non plus lui offrir beaucoup de tendresse. On devine des abîmes de non-dits entre ces deux femmes... Nina garde en mémoire la brûlure d'une gifle qu'elle reçut, adolescente, de la main de sa mère, sans raison valable...

Un jour, devenue adulte et ayant essuyé de nombreuses défaites sentimentales, Nina s'éprend d'une femme, Flora. Nina doit rejoindre Flora à Milan. Elle explique à sa mère qu'elle va s'absenter pour des raisons professionnelles. Et la mère de Nina décide de s'imposer pendant ce voyage, elle veut voir Milan, elle qui a si peu voyagé dans sa vie ! Nina est mise au pied du mur et se voit obligée d'emmener sa mère à Milan, où il est prévu qu'elles partagent deux journées ensemble. Ensuite, la mère doit repartir. Sur la route, les langues se délient. Nina demande à sa mère le pourquoi de la fameuse claque magistrale. Et la mère de s'excuser, de dire que c'est l'immense détresse où l'avait plongée son mariage qui, ce jour-là, l'amena à frapper sa fille de la sorte... Les deux femmes se parlent enfin, elles sont plutôt bien ensemble. Quand elle voit venir Flora de loin, la mère de Nina dit : « Cette femme rayonne. Elle rayonne pour toi ». Elle a compris que ce qui lie Flora et Nina est bien plus qu'une relation professionnelle. Elle rentre chez elle en avion, Nina reste à Milan.

Deux ans plus tard, la mère de Nina tombe malade. Elle s'éteint lentement dans un hôpital. Après sa mort, Nina découvre des tas de photos dans le grenier de la maison de sa mère. Dont une liasse portant la mention : « Seulement pour Nina ». Il s'agit de souvenirs du seul amour qu'eut la mère de Nina dans sa vie. Un amour pour une femme...

Tout cela est écrit dans une langue limpide et douce. On se laisse emporter par le récit de cette relation si complexe. Mais le lien mère-fille ne l'est-il pas fatalement ? Grand moment de lecture... Merci, Elke ! Evidemment, en lisant ces pages, j'ai souvent eu les larmes aux yeux. J'ai pensé à Berlin, à ce voyage magnifique que j'y fis avec ma mère en 2007, à tout ce que nous avions partagé alors... Les morts ne nous quittent jamais. C'est sans doute le sens de cette phrase si terrifiante et si juste de Léo Ferré : « On couche toujours avec des morts »... Non, les morts ne nous quittent jamais. Un parfum, un sourire, une chanson, un livre les assoient soudain à nos côtés. Cela fait du mal et du bien à la fois...