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16/11/2008

Il faut que je vous raconte !!

 

La nouvelle nous est tombée dessus il y a exactement neuf jours. Grande réunion exceptionnelle à laquelle tous les personnels de l'établissement étaient conviés. Sur l'estrade, face à nous, nos chefs, et deux membres du Conseil Général. Tous là pour nous présenter un constat accablant : les locaux abritant notre collège sont trop vétustes, les remettre en état reviendrait trop cher. Et, surtout, à quoi bon entreprendre de grands travaux de ce genre pour une minuscule poignée d'élèves (243 au total) que l'on pourra aisément recaser ailleurs, les établissements autour étant légion ? Ben oui, quoi, où est le problème ? 243 élèves, à peine trente profs, une principale, un principal-adjoint, une gestionnaire, une secrétaire, je ne sais combien d'agents de service : quantité négligeable, voyons !
Devant ce constat accablant qui nous a ... accablés, nous sommes pour la plupart restés sans voix. Quelques collègues, quand même, se sont insurgés contre la manière brutale et sans appel dont le truc nous tombait sur le paletot, l'un d'eux a parlé de trahison. Parce que ce collège, oui, d'accord, il n'accueille que 243 élèves, mais les profs qui y sont en poste font tout pour redresser la situation et redorer le blason d'un établissement dont la réputation n'est pas des meilleures... En fait, ce collège réussit un pari assez fou : celui de la mixité sociale. On y est complètement, les deux pieds dedans. Parce que nous recrutons à la fois dans un quartier extrêmement pauvre et dans des milieux plutôt favorisés. L'avantage, c'est que comme les effectifs sont bas, certains gamins peuvent bénéficier d'un soutien quasi individuel et personnalisé. Je suis arrivée là en septembre de cette année, je ne peux donc pas donner d'exemples concrets d'élèves tirés de la misère, mais les collègues qui connaissent bien les lieux m'en ont cité plus d'un.

Bref... Nous apprenons la nouvelle le vendredi 7 novembre, au retour des vacances. Nous avons pour ordre de ne pas répandre l'information avant le jeudi 13. Date du Conseil d'administration, auquel seront conviés des parents d'élèves. Seulement, voilà : dès le lundi 10, des gamins avaient déjà entendu que... Et, surtout : jeudi 13, article dans le journal. Un article présentant notre bahut comme malade. Jusqu'au trognon. C'est à se demander si nous ne risquons pas notre peau à chaque fois que nous pénétrons en son enceinte et si nous ne devrions pas, tous autant que nous sommes, toucher une prime de risque ! A côté de cela, le collège est aux normes de sécurité quand même. Mais frappé par un « processus de dégradation irréversible »... En gros : le bidule va se casser la binette, mais aucun danger pour l'année scolaire en cours, cela tiendra jusqu'au 4 juillet 2009 !

Ce qu'il y a de plus affreux et d'indigeste dans cette affaire-là, c'est que l'article du journal s'appuyait sur des propos de profs (qui n'auraient, paraît-il, plus envie de travailler chez nous à cause des mauvaises odeurs générées par des problèmes sanitaires). Or, si je ne m'abuse, aucun prof n'a été consulté avant la parution de cet article.

Depuis, des lignes là-dessus, il y en a eu encore ! J'achète le journal tous les jours, du coup ! Vendredi, les parents d'élèves avaient la parole. Ils se montraient consternés par la brutalité de l'annonce (ah, tiens, eux aussi ?!). Hier, l'article s'intitulait « La polémique enfle ». Aujourd'hui, encore un article : cette fois, les députés s'en mêlent ! Ils ont rencontré une délégation de parents d'élèves et souhaitent à présent avoir un entretien avec des profs. Ah, quand même, nous existons aux yeux de quelqu'un !!

Moi, ce que je dis de tout cela est simple : pourquoi flinguer une équipe qui gagne ? A l'heure où on nous bassine avec la mixité sociale, pourquoi couper l'herbe sous les pieds de ceux qui font tout pour qu'elle soit de ce monde ?! Bien sûr, 243 élèves, d'un point de vue strictement mathématique, c'est peu. Mais, d'un point de vue humain, ce n'est pas rien ! Et puis, la mort d'un établissement, n'en déplaise à ces messieurs les politiciens qui ne raisonnent qu'en s'appuyant sur des chiffres, la mort d'un établissement, c'est toujours une défaite, un deuil pour le quartier autour. Depuis neuf jours, je suis remplie d'amertume... Mais nous n'avons pas dit notre dernier mot ! Suite au prochain épisode !