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24/11/2010

Sommerlügen

 

Bernhard Schlink est l'auteur du magnifique roman Der Vorleser (Le liseur). Mais pas seulement ! Il a également écrit Liebesfluchten, Die Heimkehr et d'autres livres que je n'ai pas encore lus. Liebesfluchten, c'est un recueil de nouvelles. Toutes plus captivantes les unes que les autres. Dans la même veine, voici Sommerlügen, le petit dernier de Schlink. Tout beau, tout chaud, tout frais. Je le sirote à longs traits, prenant le temps de m'en imprégner... La langue de Schlink est d'une grande douceur. Souvent, elle se fait discrète, effleure les choses sans réellement les nommer. Les nouvelles du recueil Sommerlügen (pour la traduction française, il faudra patienter encore un peu, mais l'idéal est bien sûr de savourer Bernhard Schlink directement en allemand !) sont empreintes de poésie, parfois de suspens aussi. Certaines s'achèvent de façon inattendue, et l'on ne sait pas ce qu'il va advenir des personnages, de leur histoire, de leurs névroses. On imagine ce que l'on veut. C'est ainsi que dernièrement, certains soirs, je me suis endormie en échafaudant une fin pour telle ou telle nouvelle !

On lira, dans Sommerlügen, l'histoire d'un écrivain raté qui épouse une femme, auteur à succès. Il va peu à peu l'enfermer, la couper du monde, l'empêchant d'aller assister à des remises de prix littéraires, etc. Il lui « offre » une maison dans la forêt (d'où le titre, « Das Haus im Wald »). Une maison dans laquelle il lui sera aisé d'isoler sa femme du reste du monde... Peu à peu, on plonge dans les arcanes de la folie de cet homme et dans l'enfermement auquel il condamne la femme qu'il prétend aimer...

Sommerlügen, c'est aussi « Der Fremde in der Nacht » et l'histoire de cette étrange rencontre, dans un avion, entre deux hommes que tout sépare. L'un d'eux a tué sa femme, mais s'en défend si bien que l'autre, intelligent, cultivé, sensé pourtant, finit par le croire et par s'attacher à cet inconnu.

Il y a aussi « Der letzte Sommer » qui retrace le dernier été d'un homme qui se sait condamné par la maladie. Ayant passé toute sa vie dans la méditation, l'étude et les livres, il se met soudain à vouloir vivre pleinement, il s'occupe de ses petits-enfants et de sa femme comme il ne l'a jamais fait. Par ailleurs, il s'est procuré en Suisse une dose de poison qu'il a décidé d'ingurgiter quand les douleurs seront trop vives...

Hier soir, j'ai fini la nouvelle intitulée « Johann Sebastian Bach auf Rügen ». Un homme et son fils ont passé leur vie à se louper, à ne pas se comprendre (il existe en allemand une expression magnifique pour dire cela : « aneinander vorbeileben »). Les deux hommes vieillissent, le fils ne parvient pas à faire la paix avec son père. En même temps, il a peur de le perdre et de ne l'avoir jamais réellement connu. Alors il décide de partir quelques jours avec lui sur l'île de Rügen, où se déroule un festival consacré à Bach. Tous deux assistent ensemble à différents concerts qui donnent presque systématiquement lieu à des moments de recueillement. Mais jamais ils ne parviennent à communiquer, le fils est demandeur pourtant, mais le père reste verrouillé, répondant de façon évasive aux questions de son fils ou les éludant carrément... Cette nouvelle m'a bouleversée. Sur le chemin du retour, le père et le fils écoutent de nouveau Bach dans la voiture. Et voilà que le père se met à pleurer à chaudes larmes, lâchant enfin la bonde à ses peines... A ce qui est peut-être un trop-plein de sensibilité, habilement cachée à tous pendant de longues années... Cette histoire m'a fait penser à une nouvelle d'Elke Heidenreich évoquée ici il y a quelques mois et dans laquelle une fille se rapproche de sa mère peu de temps avant que cette dernière ne meure... D'une grande beauté. Tout comme ces mensonges d'été, dont il ne me reste malheureusement plus qu'une nouvelle à découvrir, « Die Reise nach Süden ». Finir un livre qu'on a aimé, c'est toujours (en tout cas pour moi !) un déchirement. Et, maintenant que je me sens vieillir et que l'insouciance m'a quittée, chaque dernière page sonne comme un adieu. Parce que même si j'ai aimé le livre en question, je ne suis pas certaine de pouvoir le relire un jour...

« On finit toujours sur l'éternel quai de gare des adieux »...